vendredi 9 août 2024

Sortir du bois

             Les dernières semaines ont été bien remplies. Notre potager et notre petite forêt nourricière nous ont tenu ma blonde et moi passablement occupés. C’est sûr qu’on se trouve loin de l’océan et des plages mais le petit lac qui se trouve pas loin a été parfait pour nous rafraîchir lors des journées de canicule. Mis à part quelques insectes suceurs de sang, y’a pas de quoi se plaindre de cette vie dans les bois. 

Dans une autre branche, je n'ai pas chômé comme chauffeur.  Entre autres, deux gros voyages de camps d’été juifs en destination de La Ronde. Le premier avec les fillettes, le second avec les garçons. Les unes ne se mêlant pas aux autres, chacun dans leur monde à part.  J’ai trouvé fascinant d’être en leurs compagnies le temps de ces itinéraires. Bien sûr, ce sont des enfants. Ça crie, ça niaise, ça se dispute, ça n’écoute pas les consignes et ça salope l’autobus. Mais les entendre chanter tous ensemble des airs folkloriques ou du rap en yiddish au travers leurs conneries et leurs prières, mettons que ça sort des sentiers battus. 


Assez dépaysant également de me retrouver à faire le touriste dans une ville où j’ai vécu plus de la moitié de ma vie. Tant qu’à attendre cinq-six heures dans le stationnement de la Ronde, j’en ai profité lors du voyage des gamins pour prendre la navette fluviale et rejoindre les centaines de visiteurs amassés dans le Vieux-Montréal. J’ai traversé une Place Jacques-Cartier bondée pour aller manger un phô dans le Chinatown et ensuite errer ça et là sur Sainte-Catherine et dans le quartier latin. Chaque racoin me rappelant un souvenir de ma vie d’avant. Combien de fois ai-je arpenté ces rues montréalaises ? Moi qui n’a pas tant cette fibre nostalgique, j'étais content de revenir me faufiler dans ses embranchements.  


J’ai pris le métro jusqu’à l’île Sainte-Hélène pour retourner dans la nature. Je suis passé sous la Biosphère et traversé lentement un petit boisé pour me retrouver auprès du fleuve Saint-Laurent. Assis sur un banc, j’ai regardé cette ville en me disant que pas mal d’eau avait coulé depuis mon départ dans le nord. J’ai laissé mon esprit voguer devant ces eaux en imaginant ce que pouvaient être ces lieux lorsqu’ils n’étaient que forêt. Vils fantasmes.



            J’ai rejoint mes confrères dans le stationnement.  Plusieurs d'entre eux manifestaient déjà leur impatience de reprendre la route.  Quelques-uns se gênant à peine dans leurs commentaires antisémites. N’ayant pas envie d’entendre ça, je suis allé m’asseoir dans mon véhicule pour attendre mes jeunes passagers qui lentement se massaient devant les autobus. Au travers eux, une minivan s’est faufilée et arrêtée. C’était le banquet de fin de journée pour ces enfants. Plusieurs dizaines de boîtes de pizzas et de pâtisseries sont apparues. Je me suis régalé lorsqu’on m’a offert un énorme rugelach fourré au chocolat. Rapidement, un nuage de mouette s’est joint au festin.  Sur fond de ciel crépusculaire, une scène complètement surréaliste, absolument unique.


    Après s’être bien bâfrés, les gamins sont revenus dans leurs autobus respectifs et nous avons repris la route dans un calme plus ou moins relatif vers leur camp de La Minerve. Deux longues heures de route pour les reconduire à bon port, une autre pour ramener l’autobus au garage, faire le ménage, faire le plein et remplir les papiers inhérents au voyage. Fatigué mais satisfait de ma virée montréalaise, j’ai retrouvé mon bois, ma blonde et notre lit. J’ai dormi comme une bûche.


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